Article 40 : A 50 ans j'ai pris ma retraite... la suite

Publié le par Meggy de Génissieux

Article 40 : A 50 ans j'ai pris ma retraite... la suite

Chapitre 4 : Les sages m’ont appris…mon cheminement vers moi

 

L'absence de nourriture, de nourrissement intellectuel a été difficile à supporter

Le travail peut être source d'épanouissement. Si quelqu'un trouve son épanouissement dans son travail, il ne comptera plus son temps, son investissement, donnera tout. J'ai connu ce temps là. Je me suis nourrie au contact de nombreux partenaires, de nombreux collègues de travail, dans le cadre de différentes missions qui m'ont été confiées.

Puis un jour, plus rien. Plus d'envies, plus d'appétit, plus de nourriture. La source s'est tarie. Départ d'un craque, plusieurs supérieurs qui n'y connaissaient rien et ont dû s'approprier le vocabulaire, les concepts… et puis quelqu'un qui est indésirable (c'est ainsi que je ressentais les choses) n'intéresse personne. On ne l'appelle pas, on ne lui demande jamais de nouvelles, on l'oublie dans son trou.

Oui je me suis sentie rejetée dans l'environnement dans lequel j'étais employée.

 

Les 6 derniers mois que j'ai vécus au sein de ma collectivité ont été d'une violente et amer…quiétude.

J'étais bien planquée, dans mon petit placard de 16 m2… oui d'accord aujourd'hui on construit des chambres de 9 m2, mais chez moi il y avait la sacro sainte table de bureau avec retour et meuble tiroir, le tout en gris fonction publique, la table ronde assortie, et 2 armoires (paperasse administrative oblige) l'une beige l'autre noir… oui on fait aussi de la récup et quelques efforts quant à la réutilisation du matériel.

Dans mon petit bureau où la fenêtre ne s'ouvrait que par le haut et seulement de 20 cm, donnant sur une toute petite cour intérieure, certes ce n'était pas le bagne… J'avais de la chance finalement car je ne travaillais pas à l'usine, ni dans un entrepôt non climatisé à emballer les fruits  . Logée au chaud l'hiver, ou rafraichie à la clim en été. Certains lecteurs penseront que j'ai été bien bête de quitter ce paradis.

J'aurais pu tout aussi bien ne pas venir travailler, personne ne s'en serait rendu compte.

J'ai tenté en vain, de me créer du travail. Mon job consistait à amener des gens à participer à des réunions tandis que de leur côté, pris par leur charge de travail souvent exorbitante, ils essayaient de les esquiver, argumentant avec toutes sortes d'excuses… On s'est de plus en plus rarement croisés eux et moi. Comment les blâmer ?

L'indifférence parfois lourde à supporter, des autres. Leur regard. Je me suis donc peu à peu repliée sur moi-même, enfermée pour que l'on ne me voit pas ne rien faire, déprimer, souffler, me lamenter à longueur de journée.

En effet, si avoir beaucoup de travail est extrêmement flatteur, pour l'ego bien évidemment, ne pas en avoir suffisamment blesse l'ego, bien conditionné par le système scolaire, les formations, les organisations.

Et une journée entière à ne rien faire, c'est très long, déprimant et épuisant.

 

Trucs et astuces pour tuer le temps au bureau quand on s'ennuie

Et plus le temps est passé, plus je me suis lâchée. Plus j'ai lâché prise aussi. J'ai commencé à amener de la lecture, puis du travail personnel, je foisonnais de projets et ma créativité débordait comme je laissais divaguer mes idées, souvent dans la lune… J'ai même surfé sur Internet depuis mon poste de travail ce qui était strictement interdit, mais en tant que cadre je n'ai jamais été contrôlée, ni inquiétée. Ouf !

En préambule de toute activité au bureau, il faut surtout bien étaler ses papiers, cahiers, dossiers, agenda sur le bureau, pour faire semblant, montrer aux collègues qui passeraient fortuitement par le bureau que vous êtes vachement occupée, voir comme le dit Zoë Shepard "Dé bor dée !".

Lire, lire lire : J'ai passé pour ma part, des heures entières à tenter de comprendre ce qui m'arrivait, et à chercher les outils pour m'en sortir. Merci Zoë pour ton bouquin, que j'ai mis des années à accepter, tant j'y croyais à MA fonction publique et tant je la défendais les valeurs. Mais combien j'ai ri et passé de très agréables moments à lire son livre quand j'ai été prête.

Et puis j'ai lu le journal local, chaque jour, consciencieusement, en bonne fonctionnaire fainéante que j'étais.

Tous les fonctionnaires lisent la presse, car il faut toujours se tenir informé. Cela fait bien de dire aux élus qu'on les a vus dans le journal, inaugurer, poser la 1ère pierre, faire un beau discours.

J'ai horreur de ces simulacres de VIP qui consiste à se faire photographier soit-disant posant la 1ère pierre d'un édifice dont ils endosseront la paternité (pauvre maçons oubliés dans l'affaire) ce qui compte avant tout, c'est le politique qui aura distribué l'argent du contribuable (comme si c'était lui qui donnait l'argent…).

On a là généralement la brochette des notables du coin. Le maire n'est plus reconnaissable, car il a abandonné le ruban tricolore qui le caractérisait, et idem pour le Préfet qui sort très rarement dans sa tenue d'apparat.  On reconnaît les opposants assez facilement, car ils sont en bout de photo essayant d'y entrer comme ils peuvent. A moins d'être dans le vent (dans le confidences) tout près des élus, personne ne sait qui est qui et tout le monde s'en fout !

Surtout que la pose de la 1ère pierre est suivie, quelques années plus tard (rarement des mois) de l'inauguration , qui n'a pas évolué d'un pouce depuis des lustres. On coupe le ruban tricolore (à une multitude de doigts là encre : maire, Préfet, Président du Conseil Général, Régional, Députés, Sénateurs, opposants de gauche quand les locaux sont à droite, opposants de droite quand les locaux sont à gauche.

Aucun technicien ne doit figurer sur la photo, ni être cité dans le canard ! Ce ne sont que les petits travailleurs de l'ombre. Il y a des consignes !

Je hais et j'ai toujours haïe ces cérémonies, qui n'offrent qu'un spectacle pitoyable de nos pauvres politiciens.

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